Ajin est un seinen publié dans les années 2010 jusqu’au début des années 2020.
La lecture est très fluide, sans trous de narration, de moments d’intensité extrême ou d’autres éléments pouvant interrompre la lecture. Cette fluidité rend la lecture très agréable, et il est tout à fait possible de ne pas voir passer les heures jusqu’à avoir faim.
Un désavantage est, en revanche, que la délimitation entre les tomes est très faible et que les arcs scénaristiques ne laissent pas de fortes impressions. Il est assez délicat de détailler ce point, car il s’agit principalement de densité de narration et de tension dramatique.
Pour être plus précis, le premier arc, qui s’étend selon moi du début jusqu’au conflit entre le personnage principal (MC) et l’antagoniste (An), a une certaine tension dramatique qui est atténuée par le détachement du MC.
Même si la tension est forte, le fait que le MC présente des réflexions détachées à chaque situation diminue fortement l’implication du lecteur, puisque ce dernier se place naturellement en retrait par rapport aux personnages.
Dans les arcs suivants, le MC s’implique un peu plus, mais les situations amènent à moins de tension, ce qui compense et permet de garder finalement une pression relativement constante du début à la fin du récit.
Le développement des personnages
Ce qui me semble être la plus grande spécificité d’Ajin est le traitement des personnages.
En effet, là où l’on parle généralement de développement des personnages, ces derniers ne sont ici pas développés. Ou plutôt, ils sont développés, mais n’évoluent pas.
Ainsi, sur la dizaine de personnages développés, très peu vont changer de comportement ou d’état d’esprit au fil de l’œuvre.
On compte parmi eux le personnage principal, qui accepte d’être un peu sentimental, et un des alliés de Sato qui retourne sa veste.
À l’opposé, que ce soit le scientifique, les deux têtes brûlées, le premier responsable de la chasse aux Ajins ou encore Sato, bien qu’ils changent d’alliés et d’objectifs, aucun ne change réellement de comportement ou de motivation.
Un problème ?
À première vue, on pourrait penser que c’est un problème. Pourtant, c’est en fait assez logique.
Avec le peu de temps qui se passe entre les événements, il est difficile de vraiment changer, d’autant plus que lorsque des humains sont confrontés à un fort impact émotionnel, il est plus que naturel de s’accrocher coûte que coûte à ses premières intentions.
Bien sûr, il serait ennuyeux de faire une narration longue sans que les personnages changent, mais la durée de l’œuvre et le fait que les combats soient les plus grands enjeux permettent à cet élément d’être bien géré dans les 17 tomes.
Plus en détails
Pour rentrer un peu plus dans le détail de la lecture, le manga se base surtout sur des combats sanglants que je trouve bien gérés.
Les dessins sont classes et les chorégraphies m’ont l’air cohérentes. Je n’ai pas non plus remarqué de problèmes dans la représentation des corps, comme on peut en trouver dans d’autres œuvres.
Il n’y a pas, par exemple, de têtes coupées ou de bras cassés à la seule force humaine.
Les phases de réflexion sont aussi bien faites : elles sont imbriquées dans l’action de manière à ce qu’il n’y ait pas de moment où il est nécessaire de totalement mettre son cerveau de côté pour apprécier l’œuvre.
Enfin, les phases de repos/préparation sont également assez bien faites : elles vont à l’essentiel sans être trop intellectuelles, nous laisser nous ennuyer ou donner l’impression d’être inexistantes.
Je trouve également que l’opinion publique est plutôt réaliste : très influencée par les médias mais restant majoritairement modérée.
L’utilisation faite de la science pour expliquer les phénomènes paranormaux est aussi bien faite, puisque l’explication repose vaguement sur de la physique, mais il est clairement dit que tous les scientifiques considèrent que cette explication n’a aucun sens — c’est juste la seule proposée.
De plus, les quelques revirements de situation basés sur cette explication (la téléportation et la destruction de murs) sont bien gérés : relativement prévisibles, mais pas trop, et on ne tombe ni dans les déboires d’Hunter x Hunter, ni dans le “ta gueule, c’est magique”.
Finalement, Ajin est une série agréable à lire et qui possède une bonne narration, mais manque de passages marquants ou d’une singularité qui me permettrait d’en faire une analyse plus poussée qu’un simple cas d’école de “c’est bien fait”.
C’est, selon moi, le seul vrai défaut de cette œuvre, a chacun maintenant de considérer de quel importance est ce défaut a ces yeux.